Tout est banal
Extrait de mon livre à paraître bientôt ^^ :
Objectivement, tout est banal. Personne n’est spécial, ou tout le monde l’est. L’exception est soumise au regard. J’ai arrêté de me sentir spécial en même temps que Nathalie. Elle était la caractéristique qui me singularisait. Je suis de nouveau « Monsieur tout le monde ».
Tout est banal.
Mes lamentations pleurées sur papier, mes jérémiades manuscrites, beaucoup les ont vécues.
Nous sommes nombreux dans ce malheur, mais toujours seuls dans notre peine. Je ne souffre pas plus qu’un autre dans une situation similaire, même si je m’en persuade.
Il y a d’ailleurs fort à parier que, confronté au larmoiement sentimental d’un autre, pris de dégoût, j’aurais fui.
Comment me fuir ?
Peut-être en arrêtant de commémorer. En arrêtant de rafraîchir la tombe de mes amours déchus, en arrêtant ce va-et-vient incessant dans mon cimetière mélancolique, en éteignant les bougies pour que ne coure jamais plus de feu follets dans mon passé.
En offrant mon dos à Nathalie pour la première fois où elle me le demande.
Et reviennent dans mon esprit ces mots que me disait Père.
« Pendan ou ka pléré, ou pa ka avansé »*
Je ne peux pas me reprocher d’être visité par la nostalgie. Je peux continuer à vivre entre deux visites. Je peux profiter du sursis auquel je suis condamné, pour citer Gainsbourg.
Tout perdre implique tout avoir à prendre.
Je veux me goinfrer.
Je veux rire, danser, chanter, écrire, goûter.
Je ne peux plus avoir Nathalie. Soit. Je prendrais tout le reste.
* Le temps que tu passes à te plaindre, tu ne le passes pas à résoudre ton problème